

HÉRAULT - Vidéosurveillance/Vidéoprotection...entre idéologie et réalisme, entre crainte et confiance
Par Jean-Claude BOREL-GARIN - Pour OCCITANIE TRIBUNE et EUROTRIBUNE, le 27 Février 2025
Vidéosurveillance/Vidéoprotection...entre idéologie et réalisme, entre crainte et confianc
Les 2 mots recouvrent le même objet car la sémantique a évolué. A l'origine, le terme utilisé était celui de vidéosurveillance mais il heurtait certaines sensibilités pour lesquelles le citoyen ne saurait être surveillé, d'où le changement d'appellation plus conforme à ses finalités de protection des citoyens prévues par la loi.
On peut estimer que le terme vidéoprotection est la vision optimiste du terme vidéosurveillance et vice et versa.
En effet, au-delà de son utilisation pour améliorer la sécurité, un dispositif de vidéoprotection peut également servir :
- - à gérer l'espace public et à identifier ceux qui le souillent et le dégradent
- - à repérer les poubelles qui débordent, les dépôts d'ordures sauvages, les épaves de véhicules (autos, motos, vélos, trottinettes), les tags... afin d'agir sans délai pour mettre fin à ces désordres
- - à orienter les secours ou les forces de l'ordre à l'occasion de calamités publiques. (Inondations, séismes, effondrements...)
- Les opinions sur cet outil se divisent entre les pour, pragmatiques, les contre, idéologues, et les pour sous conditions, les plus réalistes, la souhaitant strictement encadrée dans ses finalités (énumérées dans l'article L251-2 du code de la sécurité intérieure), sont inaudibles.
Les quelques lignes qui suivent devraient éclairer le débat, apaiser les craintes des uns et modérer l'optimisme des autres.
I - L'argument de l'inefficacité
- La vidéoprotection est inefficace dans la lutte contre la délinquance. Des enquêtes universitaires le prouvent.
Exemples entendus :
- - il y a de nombreuses caméras à Nice, elles n'ont pas empêché l'attentat au camion fou...
- - un employé municipal de Grenoble a été abattu sous l'objectif d'une caméra...
- - les malfaiteurs agissent le visage masqué...
- - dans les lieux de trafics elles sont systématiquement détruites ou encore, elles n'empêchent pas le trafic...
La réalité
- En aucun cas la vidéoprotection ne saurait être le remède miracle pour en finir avec la délinquance ou la criminalité. Ce n'est qu'un outil parmi d'autres moyens technologiques telle l'analyse de l'ADN, dont dispose la criminalistique pour rechercher, de manière scientifique, les circonstances de
la commission d'une infraction et en identifier les auteurs.
En effet, la vidéoprotection n'empêchera pas forcément la commission d'une infraction mais, par sa présence, elle pourra anticiper un acte, dissuader les auteurs, les éloigner, conforter la preuve des faits voire innocenter un suspect. Elle pourra être aussi utilisée pour pister les délinquants et les arrêter en flagrant délit.- Les enquêtes universitaires sont anciennes et ont toutes les mêmes biais. Elles ne tiennent pas compte de la couverture vidéo de la ville étudiée (nombre de caméras, emplacements), non plus que de son niveau de criminalité.
Dans une ville disposant d'un réseau bien maillé de caméras, subissant une délinquance importante, l'impact sera bien meilleur que dans une ville à la situation inverse. Quand bien même peu de faits seraient élucidés, derrière la statistique il y a des victimes qui seraient satisfaites de voir leurs voleurs ou agresseurs identifiés.
- - A Nice, le camion fou a été filmé à 2 reprises, bien avant l'attentat, par des caméras dans un secteur où il ne pouvait circuler. L'intelligence Artificielle (IA) n'aurait pas manqué de lancer une alerte. Néanmoins, les images ont permis d'établir clairement le déroulement de cet acte de terrorisme.
- - A Grenoble, le tueur a agi de manière irréfléchie, à l'instinct, sans se préoccuper de la présence ou non d'une caméra. L'enregistrement montre, cependant, comment les faits se sont réellement déroulés et permettra de confronter l'auteur à ses mensonges éventuels...
- - Les malfaiteurs ne partent pas de chez eux le visage masqué, ils sont donc identifiables à un moment ou à un autre sur leur trajet...
- - Dans les lieux de trafics les matériels doivent être « durcis » (coque et objectif blindés), difficilement accessibles et reliés à une IA pour s'autoprotéger.
- - Si la vidéoprotection est inutile pourquoi les spécialistes de la sécurité, Préfets, Procureurs, Policiers et Gendarmes, n'ont ils de cesse de la réclamer ?
Pourquoi, de plus en plus de Maires, auparavant hostiles, confrontés dans leurs villes à de graves problèmes de délinquance et de propreté ont-ils été contraints, sous la pression de leurs administrés à changer d'avis ?
Ces édiles ont compris, qu'en campant sur une position idéologique et en refusant de tout mettre en œuvre pour assurer la sécurité de leurs concitoyens, ils contribuaient à mécontenter leurs électeurs et à renforcer l'électorat de leurs adversaires.
Enfin tous les jours les médias relatent des infractions élucidées grâce aux images enregistrées par des caméras sur la voie publique.
II - L'argument des craintes pour les libertés publiques
- - La vidéosurveillance nous espionne dans notre vie quotidienne.
- - Un pouvoir autoritaire pourrait l'utiliser pour traquer ses opposants.
La réalité
- Un téléphone portable ou une carte bancaire sont des outils beaucoup plus redoutables que la vidéoprotection pour espionner les citoyens. Rares sont les individus qui n'utilisent pas l'une ou l'autre de ces technologies...
- En France, la vidéoprotection sur la voie publique est très encadrée par le code de la sécurité intérieure (articles L251-1 à L255-1) et par la Commission Nationale Informatique et Liberté (CNIL). Les lieux privés et l'intérieur des habitations ou des immeubles ne peuvent être filmés par une caméra installée sur le domaine public. Seul un magistrat, dans le cadre d'une procédure judiciaire, peut autoriser à déroger à cette interdiction.- Sans l'aide de l'intelligence artificielle (IA), un agent ne peut surveiller efficacement plus de 20 écrans. Comme toute création humaine, l'IA peut être un progrès au service des citoyens ou une lourde menace lorsque son usage est détourné. L'exemple du camion, qui sert habituellement au transport de marchandises transformé en arme dévastatrice ou encore l'énergie nucléaire et ses deux facettes civile et militaire sont là pour nous le rappeler.
- Un pouvoir autoritaire n'aurait que faire des dispositifs en place, il aurait la capacité de généraliser la vidéosurveillance, de renouveler les dispositifs actuels par des matériels plus performants pilotés par une IA intrusive.
Le progrès étant inarrêtable, il est imaginable que dans un avenir proche, des mini drones, munis d'une caméra miniature, soient en capacité de filmer des objectifs en toute discrétion. L'usage de cette nouvelle technologie devra, elle aussi, être strictement encadré afin qu'elle ne puisse porter atteinte à la vie privée que dans un cadre prévu par la loi.
Enfin, il est pour le moins paradoxal que ceux qui estiment que la vidéoprotection est inefficace, proclament qu'ils refusent d'être espionnés et expriment leur hostilité en manifestant dans la rue.
Ils ne devraient avoir aucune inquiétude, en effet, si la vidéoprotection est inefficace il y a très peu de possibilités qu'elle puisse leur nuire...
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